CINEMA

FNC : Interview du réalisateur Nicolas Vanier

Les chasseurs sont les gardiens de la nature 

Cinéaste, reporter, grand voyageur et militant : Nicolas Vanier réaffirme avec ce film ses convictions profondes, celles du retour aux choses simples, d’une écologie portée par des hommes ancrés dans la nature. Entretien. 

La Fédération nationale des chasseurs : Votre film "L’École buissonnière" porte-t-il sur la chasse ?

Nicolas Vanier : « Ce n’est pas un film axé sur la chasse. C’est un film qui parle d’un homme qui vit dans la nature et dans la forêt. C’est quelqu’un qui n’est ni pêcheur ni chasseur. Tout le monde prélève ce dont il a besoin pour vivre dans la nature. Mais de plus en plus via des intermédiaires.  Ceux qui  prélèvent directement dans la nature se font  de plus en plus rare. C’est le message que l’on tente de faire passer dans ce film. Les gens ne se rendent pas compte que tout ce qu’ils utilisent provient de la nature. Aujourd’hui beaucoup d’enfants, à la question "d’où vient le lait ?"  répondent qu’il provient du magasin alors qu’avant de provenir du magasin, il vient d’une vache. Dans ce film, on voit un homme qui  a une relation directe avec la nature. Cet homme a une empreinte écologique beaucoup plus faible que celle d'un citadin qui entretient avec la nature une relation indirecte. C’est pour ça qu’il faut prendre avec discernement le discours de certains bureaucrates des villes qui lancent des grandes phrases sur l’écologie. Il y a des gens en circuit court qui, certes mangent du poisson, mangent de la viande, et parfois vont la chercher avec un fusil ou une canne à pêche, mais qui respectent beaucoup plus les animaux que les autres. La prise de conscience de ces gens-là sur les dégâts causés à l’environnement se fait de façon très naturelle. »

La FNC : Vous-même, quel chasseur êtes-vous ?

N.V. : « Il s’est passé une grande période de ma vie où la question ne se posait pas parce que je suis né dans la forêt. Quand j’ai traversé la Sibérie par exemple, il m’était  indispensable et vital de prélever dans la nature par l’acte de chasse et de pêche, tout ce dont j’avais besoin pour survivre. Pendant deux ans je n’ai vécu presque exclusivement  que de la chasse, de la pêche et de la cueillette. »

La FNC : Avec "L’École buissonnière" au-delà de la chasse, vous évoquez la ruralité, la tradition, la transmission des valeurs. Y a-t-il urgence aujourd’hui à évoquer ces sujets ?

N.V. : « Le grand-père qui apprend à son petit-fils à pêcher, certes il apprend à ferrer un poisson, mais au-delà de ça il transmet des valeurs. Je pense que l’on a perdu ce lien aujourd’hui car le petit-fils est sur sa console de jeux !  On a tout à gagner à ce que les générations se retrouvent autour de la pêche, de la chasse, de la cueillette des champignons. Lorsque l’on a tourné cette grande scène de marché en Sologne, les gens sont venus me voir pour me dire : "C’est incroyable tout ce que l’on a perdu ! Aujourd’hui on va au marché le plus vite possible. Avant on s’y arrêtait pour discuter. On y réglait ses problèmes." On a perdu les valeurs de solidarité, de respect, qui ne sont plus forcément transmises d’une génération à une autre. »

La FNC : On peut imaginer que les chasseurs continuent à travailler avec vous, notamment au travers d’Ekolien, après ce film ?

N.V. : « C’est quelque chose que j’ai demandé. Au-delà du film j’espère que nous allons construire quelque chose dans la durée, oui. »

La FNC : Quelle est votre vision de la chasse aujourd’hui ?

N.V. : « Il faut faire un Grenelle de la chasse. Il faudrait un secrétariat d’État en charge de la chasse et de la faune sauvage en France. Il faudrait avec toutes les instances cynégétiques, remettre tout à plat. Il faut rentrer dans un autre siècle. Il y a des pratiques qui ne devraient plus exister. Ce que je souhaiterais c’est qu’un chasseur éprouve autant de plaisir à tuer un gibier sauvage que de faire un tableau de chasse. L’acte de prélèvement devient un acte respectueux  et légitime. Sans aller trop loin, il faudrait faire évoluer la chasse vers une chasse beaucoup plus naturelle. »

La FNC : Quelle est votre vision sur l’évolution du statut de l’animal ?

N.V. : « Je suis toujours très mal à l’aise avec cette société qui vise à faire des animaux des hommes. J’ai toujours considéré que, tout comme l’homme, l'animal doit être à sa place. L’animal n’est jamais plus heureux que quand il est à sa place d’animal. Bien évidemment, les animaux doivent avoir des droits mais attention à ne pas aller trop loin, à ne pas changer la nature comme disent les Indiens. »

 

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